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la Cagouille Enchaînée
7 mars 2011

EGALITÉ HOMMES-FEMMES : ÇA STAGNE, VOIRE ÇA RECULE

Les chiffres qui seront présentés demain 8 mars le prouvent: dans la région, le combat contre les inégalités s'essouffle. Les initiatives pour évoluer sont rares. Des femmes parlent de «recul».

Le réseau «Entreprendre au féminin» des Deux-Sèvres compte investir la Charente.

On croyait les vieux schémas rangés au rayon des souvenirs. Les statistiques qui seront présentées en Poitou-Charentes à l'occasion de la Journée de la femme (demain 8 mars), le démontrent pourtant de manière éclatante, le combat contre les inégalités hommes-femmes dans le monde du travail a encore de beaux jours devant lui: toutes catégories socioprofessionnelles confondues, les femmes de la région gagnent aujourd'hui 20% de moins que les hommes.

Plus elles ont de responsabilités, plus l'écart se creuse: en Charente, un homme, cadre dans son entreprise, touche, en moyenne, un peu plus de 39.000 euros par an. Pour une femme, c'est 10.000 euros de moins. «Pour partie, ce différentiel est incompréhensible, estime Nathalie Hugonnenc, chargée de mission aux droits des femmes et à l'égalité en Charente. On sait juste l'expliquer par le fait qu'une femme a une carrière plus morcelée en raison de la maternité. On sait aussi qu'elle est souvent moins exigeante quand il s'agit de négocier son salaire».

Un autre cliché est étayé par les chiffres: les Picto-charentaises se contentent, en majorité, de métiers dits d'«employées». Les postes «d'ouvriers qualifiés» restent l'apanage des hommes (voir l'infographie). «Le chemin vers l'égalité est encore long quand on constate que 97% des aides ménagères sont des femmes. Elles sont 84% dans les rangs des agents hospitaliers», détaille Nathalie Hugonnenc. Encore une idée reçue confirmée par les faits: la vie professionnelle des femmes est bien souvent marquée par le recours au temps partiel. Une femme sur trois en Poitou-Charentes le choisira (ou le subira?) contre un homme sur dix. «Les lignes n'ont finalement pas beaucoup bougé. Disons qu'aujourd'hui les choses évoluent plus lentement. Mais il ne faut pas oublier les énormes progrès réalisés ces vingt dernières années», relativise la chargée de mission. «Pour moi, non seulement le combat contre les inégalités n'évolue pas mais il y a un réel recul», affirme pour sa part Evelyne Videau, secrétaire générale de la CGT. La représentante syndicale entend profiter de la journée du 8 mars pour dénoncer la politique gouvernementale en la matière: «Il était prévu l'entrée en vigueur de dispositions pour l'égalité salariale avant le 31 décembre 2010. Ça a été repoussé. Il faut absolument instaurer des sanctions financières contre les entreprises qui ne s'engagent pas dans ce domaine, sinon on n'y arrivera jamais».

Rares initiatives

«J'ai longtemps été contre les quotas mais ma position a changé, concède de son côté Béatrice Soucaret, la présidente du Medef Charente assez fière d'être «la première femme à la tête de l'Union patronale en Charente depuis 1931» (année de création de l'organisme patronal). «Pour un sujet comme celui-là, la loi est nécessaire pour faire avancer le processus».

En attendant un dispositif législatif, les entreprises charentaises sensibles à la question se comptent sur les doigts d'une main: «Les Ciments Lafarge, Hennessy et le Crédit Agricole ont signé des accords sur l'égalité», liste Nathalie Hugonnenc. «En 2012, nous souhaitons qu'un cinquième des postes à responsabilité soient occupés par des femmes, insiste Elise Ginioux, directrice de communication chez Lafarge Ciments France. Le site de La Couronne a pris une longueur d'avance avec cinq femmes sur onze au sommet de la pyramide». Pourquoi cette ambition ? «Nous sommes persuadés qu'une entreprise est plus performante quand elle favorise la diversité».

Un argument partagé par Marie-Cécile Dabadie, directrice des ressources humaines chez Hennessy. Le géant des spiritueux se fait fort aussi de favoriser l'égalité salariale: «Une entreprise n'a pas de prise pour savoir qui fait la vaisselle ou qui garde les enfants à la maison. Mais elle peut agir sur la rémunération». Et parce que la «vraie» égalité, dit-elle, c'est aussi de proposer des nouveaux dispositifs aux hommes, Hennessy a souhaité rallonger la durée du congé paternité et incite les messieurs à s'absenter de l'entreprise pour garder un enfant malade. «Les initiatives de ce genre sont rarissimes en Charente, regrette Nathalie Hugonnenc. En période de crise, les entreprises ont d'autres priorités que l'égalité hommes-femmes. J'ai même constaté que les vieux schémas réapparaissent quand les temps sont durs: certains vont jusqu'à dire qu'il faut alors privilégier l'emploi masculin».

«Le retour  à un schéma traditionnel»

Le réseau s'appelle «Entreprendre au féminin» (1). Une association créée il y a peu par trois jeunes chefs d'entreprise picto-charentaises, Coralie Baudelet, Sendrine Colly et Florence Potrel. Elle recense déjà 80 adhérentes. L'ambition du «réseau» : faciliter les échanges d'expériences, partager les pratiques et échanger sur des thèmes tels que «la conciliation de la vie familiale et professionnelle». «Un sujet qu'on n'aborde pas dans les réseaux-business tenus par les hommes, commente Coralie Baudelet, 27 ans, présidente d'Entreprendre au féminin et patronne d'une société familiale d'import-export basée à Mazières-en-Gâtine (Deux-Sèvres). Mais il a un sens quand on sait que lorsqu'on est femme et chef d'entreprise on a aussi le monopole de l'organisation du foyer».

Coralie Baudelet n'est pas étonnée par les statistiques publiées en Poitou-Charentes à l'occasion de la journée du 8 mars. «Non seulement, il n'y a pas d'évolution des mentalités mais je dirais même que d'année en année, on revient à un schéma traditionnel, assure-t-elle. Je le remarque auprès de mes amies dans la région: elles font souvent de très belles études, ont la volonté d'assumer des responsabilités professionnelles mais elles sont de plus en nombreuses à donner un coup d'arrêt à leur carrière quand elles ont leur premier enfant. Celles qui ont aujourd'hui 40 ou 50 ans étaient finalement plus ambitieuses quand elles avaient notre âge».

(1) Le réseau «Entreprendre au féminin» est né dans les Deux-Sèvres et dans la Vienne. Il entend investir désormais la Charente. Renseignements sur le site internet www.entreprendre-au-feminin-poitou-charentes.com et sur le compte facebook du réseau.

   CHARENTELIBRE.fr  

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