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la Cagouille Enchaînée
29 mars 2011

CHARENTE: LE MALAISE À LA POSTE NE FAIT PAS UN PLI

29 mars 2011 | Mis à jour | 07h14    Stéphane Urbajtel

Les syndicats de La Poste en Charente appellent aujourd'hui à un mouvement de grève. Ils dénoncent le «malaise» et «la course à l'objectif». Le nouveau directeur leur répond point par point.

Selon Isabelle Congé, factrice à Touvre et déléguée départementale du syndicat SUD-PTT, La Poste a «perdu le sens du service public». Photos Majid Bouzzit

Aujourd'hui, Isabelle Congé, déléguée départementale du syndicat SUD-PTT, sera aux avant-postes. Engagée aux côtés de ses homologues de la CGT et de la CFDT devant le bureau de la place du Champ-de-Mars à Angoulême pour répondre à un appel à la grève au cri de «Stop ça suffit!» (1). Hier, la même Isabelle Congé, factrice dans la commune de Touvre, a coiffé son béret estampillé «La Poste», enfilé son pull bleu marine à liseré jaune et enfourché un vélo. Son uniforme, se souvient-elle, elle en était fière le jour où elle a prêté serment, en 1987. À 50 ans passés, elle affirme ne plus effectuer sa tournée avec autant d'enthousiasme.

«Je suis devenu un commercial»

«Il y a désormais une course à l'objectif et une pression de la direction qui n'existaient pas avant, argumente-t-elle pour justifier le mouvement de protestation d'aujourd'hui. Quand j'ai débuté, le service public avait du sens. Ça charpentait une carrière.» À ses yeux, tout a changé depuis que La Poste s'est transformée en société anonyme à capitaux publics. Un virage décidé pour affronter l'ouverture totale du marché postal à la concurrence (effectif depuis le 1er janvier dernier).

«Je ne suis plus un postier. Je suis devenu un commercial avec des objectifs de vente, se plaint Christian, un facteur du Nord-Charente, syndiqué CGT et favorable à la grève. Jusqu'alors, le facteur que vous croisiez dans la rue pouvait vous vendre des timbres. Maintenant, on lui demande d'essayer plutôt de vendre une enveloppe timbrée. C'est plus cher. Il faut faire du chiffre.» «Et à partir de mai, nous vendrons aussi aux "clients", parce que désormais on n'a plus le droit de dire "usagers", des abonnements au téléphone portable», déplore une guichetière du Champ-de-Mars. «Et parce que la rentabilité passe aussi par toujours moins de personnels, on nous annonce du changement dans l'organisation, hurle un autre facteur qui ne veut pas dire son nom. Il faut s'attendre à des tournées plus longues. On va travailler plus pour gagner autant.»

«Bonjour facteur»

Face aux inquiétudes, le nouveau directeur du groupement courrier de La Poste en Poitou-Charentes avance ses arguments. «Oui, le centre de La Poste à Angoulême a bien un projet de réorganisation qui passe par un rééquilibrage des tournées, admet Gérard Briot, tout juste nommé. Je comprends que, par nature, on a horreur des changements, mais il n'y aura pas de révolution. Nous essayons juste de nous adapter parce que le volume du trafic courrier a baissé et va baisser. On se doit d'anticiper.»

Parmi les autres projets «d'adaptation» dans la sacoche de La Poste, il y en a un autre qui inquiète particulièrement les personnels charentais. L'opération s'appelle «Bonjour facteur» et elle a été présentée il y a quelques jours à l'occasion d'une réunion interne à La Rochefoucauld. Le principe: les facteurs ne seront plus seulement là pour porter le courrier, ils pourront aussi être chargés de vérifier, par exemple, qu'une personne âgée va bien, lui porter ses médicaments ou relever à sa place son compteur de gaz. «Les facteurs font ça depuis toujours. Sans se poser de questions», s'insurge Isabelle Congé. «C'est vrai, lui répond le directeur. À la différence qu'aujourd'hui, on souhaite le formaliser.» «Et le monnayer au passage», rétorque encore la factrice de Touvre. «Ça ne coûtera rien au client. Nous espérons signer des contrats de partenariat avec les collectivités. Ce sont elles qui paieront les prestations.» Combien sont-elles en Charente à avoir, aujourd'hui, affiché leur intérêt pour cette opération? «Aucune pour le moment», admet Gérard Briot.

(1) Les organisations syndicales appellent à la grève aujourd'hui et ont prévu un rassemblement à 10h30 devant le bureau de la place du Champ-de-Mars à Angoulême.

«Entre 15% et 30% de boîtes jaunes en moins»

Les fameuses boîtes aux lettres jaunes, celles que l'on trouve au coin de sa rue en ville ou sur le mur d'une maison à la campagne, vont-elles peu à peu être sacrifiées? Les représentants syndicaux de Charente le craignent. En tout cas, affirment-ils, leur direction leur a annoncé le souhait de réduire «de 30%» le nombre de ces boîtes. «Neuf boîtes seraient notamment condamnées à Confolens», croient savoir Isabelle Congé, de SUD-PTT, et Patricia Bonneau, de la CGT.

«Nous souhaitons effectivement supprimer entre 15 et 30% de boîtes d'ici 2012 en Charente, mais uniquement celles qui reçoivent moins de cinq lettres par jour», répond le directeur courrier, Gérard Briot, qui, là encore, propose une «autre lecture» du sujet: «Voilà trente ans qu'en Poitou-Charentes le parc des boîtes aux lettres [dont le nombre n'a pas été précisé, NDLR] n'a pas bougé. Les modes de vie, eux, ont changé. Certaines boîtes ne sont plus utilisées quand il en faudrait sans doute d'autres ailleurs. Je dirais même que certaines boîtes sont dangereuses parce qu'elles sont implantées à des carrefours où le client et le facteur prennent des risques.»

Gérard Briot veut aussi être clair: les suppressions ou les déplacements des boîtes ne se feront pas sans discussions avec les maires. «Ça pourrait bien déclencher des révolutions si on supprimait certaines boîtes, imagine Annie, une Angoumoisine croisée hier en centre-ville. Je me souviens qu'il y a cinq ans, La Poste a supprimé la boîte jaune de la rue du Pont-de-Véchillot, dans le quartier Saint-Martin. J'ai cru que les personnes âgées du Moulin des Dames, la maison de retraite où était ma mère, allaient se révolter.» 

   CHARENTE LIBRE.fr   

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