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la Cagouille Enchaînée
21 avril 2011

STGA : POUR PROTESTER CONTRE LES AGRESSIONS DE CONDUCTEURS, AUCUN BUS EN CIRCULATION DEMAIN

21 avril 2011 | Mis à jour | 14h25

Aucun bus de la STGA ne circulera demain de 9 heures à 17h30 "suite à une succession d'agressions à l'encontre de nos conducteurs", indique le site du réseau de transport public.


La ligne 6 n'a pas l'exclusivité des incidents. Mais depuis quelques semaines, les problèmes se sont multipliés.
Photo Renaud Joubert

Aucun bus de la STGA ne circulera demain de 9 heures à 17h30 "suite à une succession d'agressions à l'encontre de nos conducteurs", indique le site du réseau de transport public du GrandAngoulême. Cette action intervient au lendemain de la publication de l'article de CL sur l'agression d'une conductrice à Basseau.

Jeudi dernier, un mineur a mis en joue une conductrice de bus à Basseau. Les incidents, qui sont le fait d'une poignée de jeunes, se multiplient ces dernières semaines.


"I
l fermait un oeil et pointait le canon de l'arme sur ma tête. Il faisait partie d'un groupe de cinq gamins, témoigne Chantal Fillatraud, conductrice à la STGA (Société de transport du Grand-Angoulême). Contre ça, on ne peut pas se blinder...»


C'était jeudi dernier, en milieu d'après-midi, rue Saint-Vincent-de-Paul, à Basseau. Un incident de plus, parmi une quinzaine d'autres recensés depuis le mois de février sur les lignes 6 et 7, les deux qui passent à Basseau. Au point qu'un courrier a été envoyé à la préfecture (1) pour tirer la sonnette d'alarme: «Oui, depuis quelques semaines, nous avons une augmentation des insultes, provocations ou jets de projectiles sur la ligne 6», reconnaît José Moreau, le directeur adjoint de la STGA.

Après la provocation dont Chantal Fillatraud a été victime, la police est allée faire un tour dans le quartier et a demandé des comptes au jeune homme, clairement identifié, qui avait pointé l'arme. Entre-temps, l'arme - réelle ou factice - avait disparu. William Lliso, commissaire adjoint; interroge: «Où est la limite du jeu? Il y a eu contrôle et leçon de morale. Il n'y aura pas de suite judiciaire.» Le soir même, en guise de représailles, il y a eu deux caillassages «avec toujours le même mineur, qui s'en donnait à coeur joie», raconte José Moreau. Le lendemain, rebelote. «Le vendredi soir à partir de 20 heures, la ligne a été déviée. Juste pour les derniers bus», précise Frédéric Bolze, délégué CFDT de la STGA.

«On sait gérer»

Il y a quelques semaines, une autre conductrice avait subi une intimidation du même genre: «Un petit groupe de jeunes qui se sont placés devant le bus, le soir à 21 heures. Ils m'ont forcée à m'arrêter. Ils avaient une arme et ils ont fait semblant de se viser entre eux.» Le quotidien des chauffeurs, ce sont des insultes, des tentatives de fraude, des gens ivres, des rixes entre clients, des bombes lacrymo, de la musique à fond, des crachats. «Des gamins qui s'amusent en mobylette et qui arrivent à fond et nous évitent au dernier moment», ajoute Chantal Fillatraud. Mais rien de tout ça n'affole les conducteurs: «ça, on sait gérer», relativise Frédéric Bolze. Et la ligne 6 n'en a pas l'exclusivité (lire encadré). Les jets de pierre, par contre, sont une «spécialité» du quartier. «J'ai croisé des conducteurs de la 6 faisant le tour de leur véhicule pour compter les impacts de pierres», raconte Frédéric Bolze.

Chantal Fillatraud décrypte: «Ce sont des gamins qui n'ont peur de rien. Une fois, on a expliqué à un jeune que ce qu'il avait fait allait lui coûter une amende. Il a sorti une liasse de billets de 20 euros de sa poche, et il a dit: "C'est combien ton amende?" Pour eux, la prison est un rite initiatique. Une fois qu'ils ont grandi, ils n'oublient pas de venir me dire bonjour. Et je leur dis: "Bien sûr que je me souviens de toi. Qu'est-ce que tu m'as emmerdée".»

«98% de la clientèle est géniale»

Chantal Fillatraud sait faire régner l'ordre dans son bus: «Une personne âgée, elle doit trouver une place assise. Malheur à ceux qui ne bougent pas. Les jeunes testent les limites.» La dernière fois qu'un gamin l'a insultée, elle l'a obligé à descendre du bus. Il a obtempéré.

Avec plus de trente ans de maison, dont quinze sur la ligne 6, elle compte bien reprendre le travail sur son trajet favori: «Je ne vais pas céder devant une poignée de mal élevés. Ils ne doivent pas nous dicter notre conduite. Je ne veux pas d'autre ligne. Parce que les gens sont gentils.» Elle donne quelques exemples: «Juste avant l'incident, des clients m'ont offert des chocolats, des fleurs. Il y a une petite dame qui me prépare des plats le week-end parce qu'elle a peur que je n'aie pas le temps de manger.»

Frédéric Bolze confirme: «98% de la clientèle est géniale. Et il y a 2% de petits branleurs qui n'ont pas de limites. Ce que je ne comprends pas, c'est que ces jeunes, on les transporte aussi. Et leurs parents, leurs frères, leurs tantes...» Contre eux, le syndicaliste ne cache pas son sentiment d'impuissance: «On n'a pas des choix très larges. À part ne pas desservir le quartier... Mais les gens en ont besoin. Le travail de terrain est fait, on ne peut pas avoir des bus blindés et on ne peut pas non plus taper sur les jeunes. On accomplit une mission de service public. Alors il faut continuer.»

(1) Le préfet n'a pas donné suite à nos sollicitations.

Ailleurs aussi

Il n'y a pas qu'à Basseau qu'il y a des soucis, insistent tous les témoins. Frédéric Bolze, délégué CFDT à la STGA, se souvient d'un tir sur le chauffeur, avec une arme à air comprimé, il y a quelques mois devant le centre clinical de Soyaux. «Il n'a pas été touché, parce que les vitres sont doublées d'un film qui évite de la fenêtre explose.» Chantal Fillatraud a porté plainte il y a peu contre un exhibitionniste qui sévissait à Saint-Michel. «Il y a plus d'incidents sur les quartiers parce qu'il y a beaucoup plus de monde», relativise Frédéric Bolze. «Si on le rapporte au nombre de personnes transportées, le ratio est beaucoup plus équilibré», affirme José Moreau. Un ratio que, pourtant, il ne souhaite pas communiquer.

À Poitiers, lundi, un usager armé d'un couteau a agressé un chauffeur.Les conducteurs se sont mis en grève et ont cessé le mouvement quand un suspect a été placé en garde à vue, mardi après-midi.

Un arsenal de précautions

Quand il y a un problème sur un trajet, une équipe spéciale, présente en permanence sur le réseau, organise le remplacement et épaule ceux qui ont besoin d'aide. Les incidents graves font l'objet d'une plainte, les moins graves d'une main courante. La STGA dispose d'une ligne directe avec le commissariat.

De façon régulière, des cycles de formation sont proposés aux agents. «Sur les relations avec la clientèle, la façon d'éviter d'en arriver au conflit, la gestion de l'aggressivité», énumère José Moreau, le directeur adjoint de la STGA. «On nous apprend à décrypter dans l'attitude des gens ce qui risque de dégénérer. On nous apprend à y répondre pour faire tomber l'agressivité», raconte Chantal Fillatraud.

Chaque engin a sa caméra. Parfois, des policiers en civil prennent le bus. Dans les périodes délicates, des voitures de la Bac (brigade anticriminalité) suivent les véhicules. «Quand il y a un chahut, on prend contact avec le chef d'établissement où sont les jeunes, et on intervient dans les classes, raconte José Moreau. Ce sont des perturbateurs, pas forcément dangereux, mais qui pourrissent la vie de tout le monde. Le résultat est intéressant.»

   CHARENTELIBRE.fr  

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