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la Cagouille Enchaînée
5 mai 2012

EN PRÉPARANT DIMANCHE

J’ai rédigé ces lignes au retour de mon rendez-vous avec les ouvrières de Sodimédical dans l’Aube. Je reparlerai de cette visite à cœur fendre. Des femmes courageuses, abandonnées sans paye depuis sept mois, jetées comme des chiffons par des patrons voyous, un ministre des finances qui laisse la loi et les décisions de justice être piétinés, une usine comme neuve grassement subventionnée sur fonds publics et pourtant vide. Un cauchemar. Dimanche on va régler les comptes. La moitié du chemin sera faite. Restera à faire l’autre moitié. Celle qui consistera pour les nouveaux pouvoirs publics à faire respecter la loi, punir les voyous. Et peut-être même décider les mesures qui rendront ce genre de situation impossible à l’avenir. Dimanche, le vote sanction sera un encouragement et un déblocage. Qu’il reste à faire beaucoup ensuite est dans l’ordre des choses. Mais il faut faire son ouvrage en commençant par un bout si l’on veut pouvoir finir à l’autre. Dans cette note je reviens sur l’analyse des résultats électoraux. Tel qu’est fait mon emploi du temps je ne pourrai sûrement pas me remettre devant mon clavier avant minuit ce vendredi. Ces mots seront donc les derniers peut-être avant la libération. Prenez-y votre part. Au deuxième tour on élimine. C’est le cas de le dire !

Pour illustrer ce billet, des photos du 1er mai 2012 à Paris où le Front de Gauche est venu en nombre aux côtés des manifestants puis a défilé à la fin des cortèges syndicaux jusqu'à la Bastille. Photos : S. Burlot et www.photosdegauche.fr

J’ai dit ici, déjà, que la lecture d’un résultat électoral est un enjeu idéologique. C’est toujours l’idéologie dominante qui gagne la partie visible. C’est elle qui rabâche ses refrains. Elle parvient ainsi à fixer non 1er_mai_04seulement les esprits qui en sont gavés mais aussi et surtout, elle ordonne le débat public lui-même en lui enjoignant son cadre et ses thèmes. C’est une très ancienne affaire que celle-là. Lire un résultat c’est raconter l’Histoire de son temps. Depuis longtemps on observe que l’histoire conservée est le plus souvent celle qu’écrivent les vainqueurs. La science historique est récente et souvent reléguée au profit de versions simplifiées et politiquement correctes selon l’air du temps. Si Néron est si mal vu dans l’histoire, depuis l’antiquité, c’est parce que les récitants qui travaillaient pour les pouvoirs du moment ont ramassé en un seul récit tous les ragots qui traînaient sur son compte, et jusqu’aux plus absurdes comme celui qui lui attribue l’incendie de Rome elle–même. Je cite cet exemple pittoresque et lointain pour faire sourire mon lecteur avant d’en revenir à notre quotidien étouffant. En faisant du Front National le centre de toute l’élection, les marionnettistes sont parvenus à effacer la question sociale que nous étions parvenus à ramener dans le débat. La vieille ruse a fonctionné de nouveau à plein régime pendant quinze jours. Les ravages sont immenses. Les blessures et les régressions innombrables. L’abaissement de l’esprit public, souillé par le flot de propos officiels xénophobes et chiffreles grossiers bidouillages, est terrible. La banalisation des « lepénismes » est un 20120501_0309désastre qui marquera les esprits les plus faibles pour longtemps. Le Sarkozysme s’achève ainsi dans une ambiance glauque et les odeurs d’égoût.Mais à côté de tout ce qui nous échappe de cette façon, parce que cela nous pleut dessus à grosses cordes, il y a la ligne de résistance que nous nous pouvons installer. Du moins dans nos propres esprits. C’est d’ailleurs l’essentiel. Cette résistance c’est celle qui se constitue quand on prend le temps de l’analyse et du débat argumenté. Je sais que des dizaines de réunions de bilan du premier tour ont eu lieu dans les partis du Front de Gauche ou bien en réunions publiques communes. L’examen ville par ville et parfois bureau par bureau est souvent très éclairant. Il montre une réalité bien différente du discours dominant. De toute part j’entends confirmer que l’avancée de l’extrême-droite se fait par transfert de voix de la droite. Et le nombre des localités et bureaux de vote où la course-poursuite entre nous et l’extrême-droite a été visible est considérable. Cette partie-là est jouée en dynamique. Il ne suffit pas de regarder les s du moment, il faut aussi observer les évolutions et les tendances. 1er_mai_01Il est important et très formateur de faire cet examen et d’en parler tranquillement. Car c’est de cela que nous pouvons ensuite tirer des objectifs de travail et une compréhension approfondie de notre terrain d’action. Je mentionne ce point car une leçon se dégage de tout ce que je lis et entends. C’est l’importance de l’intervention des militants sur le terrain. C’est un fait bien plus neuf qu’il n’y paraît. J’ai connu l’époque où l’opinion était très cartellisée. On bougeait des gens, à la marge. C’était, pour finir, décisif ! Mais cela ne concernait pas des pans entiers de population comme ce peut être le cas aujourd’hui. Nombreux sont les témoignages qui l’attestent. Des escouades de quelques militants, parfois seulement deux partant en campagne en voiture de village en village, ou bien de porte en porte dans un quartier populaire ont conquis des centaines de personnes. Elles n’avaient vu personne avant cela ni discuté de politique avec personne, parfois depuis bien longtemps. Le déclic ne se faisait pas selon la loi du dernier qui a parlé. Pas du tout. Il s’agit d’autre chose. Des retours à gauche, des retours aux urnes, de l’intérêt. Tout simplement parce que les filets d’eau tiède de la télé et de la radio, s’ils imprègnent évidemment beaucoup le terrain sur lequel ils se déversent, ne parviennent pourtant pas à le construire stablement. Ce que l’on retient d’un conditionnement ce sont des préjugés et des réflexes conditionnés. Rien que la verbalisation et le contact ne puisse retourner en quelques instants. L’effet Dracula s’applique aussi à l’esprit de tout un chacun. Les grandes peurs périssent d’être reconnues dirait Albert 1er_mai_08Camus. Et de même les préjugés placés sous la lumière de sa propre raison.

Pour ma part, je ne me contente pas de ce qu’on me dit, ni même de mes intuitions tirées de l’expérience. Je travaille à partir des tableaux de résultats comparés. Et je lis beaucoup de presse régionale. Car à mesure que les jours passent, il se produit un effet de vérité très intéressant sur les résultats électoraux dans la presse régionale. Jour après jour, cas par cas, sont démentis les emballements convenus qui ont été le refrain des analystes et experts qui ont péroré toute la semaine passée. Vu du terrain, la fable de la « vague Le Pen », comme dit avec une stupeur jubilatoire le « Nouvel Observateur » son allié objectif, est un phénomène pour le moins contrasté. C’est ce que montre, sur le site web de « La Montagne », le bilan de Sébastien Besse. Même si nous ne connaissons pas les communes dont il est question, son récit permet de comprendre quelles évolutions s’observent dans les bureaux de vote populaires. On y voit au contraire clairement dessinée la course de vitesse entre l’extrême-droite et le Front de Gauche. Et nos percées, souvent décisives. « Si Hollande est en tête partout, note « la Montagne », Mélenchon et Le Pen signent aussi des scores importants. Les bassins miniers toujours à gauche mais plus protestataires. L'enracinement à gauche se confirme et s'amplifie. (…) Autre constante dans ces bassins, la poussée de la gauche de la gauche et du Front national, qui progressent 1er_mai_02quasiment dans toutes les communes, parfois très nettement. À Lamontgie, Marine Le Pen culmine à 23,3%, soit +12,3 points par rapport à Jean-Marie Le Pen en 2007. Jean-Luc Mélenchon atteint les 16% alors que Marie-George Buffet s'était contentée de 2,93%. À Jumeaux, Le Pen signe aussi un gros score avec 23,2%, soit + 8,1 points. Mélenchon parvient à 16 % contre 2,45 % à Buffet en 2007. À Brassac-les-Mines, le candidat du Front de gauche pointe également à 16% et Le Pen, 16,9%, frôle les 7 points de plus que son père. « La gauche, au total, approche des 58% », signale au passage le maire (PS) André Tapissier, président de la Communauté de communes Bassin minier Montagne. À Auzat-la-Combelle, très fortement ancrée à gauche, Mélenchon récolte 20,7 %, (+ 13,7 points par rapport à Buffet). Le FN passe de 9% à 19,5%. « Il y a là une vraie tradition minière et ouvrière où les électeurs se retrouvent plus facilement dans des thèses de rupture à gauche mais qui, au second tour, votent pour le candidat de gauche arrivé en tête », commente André Tapissier. Mélenchon explose les compteurs à Esteil avec 28,3% et se retrouve deuxième, devant Nicolas Sarkozy (8,3 %). Cette commune est, par ailleurs, la seule où Le Pen connaît une baisse (6,7 %, soit moins 3,4 points). À Messeix, Mélenchon et Le Pen sont au coude-à-coude, le premier obtenant 13,5% (+ 8,34 points) et la seconde 13,2% (+ 4,92 points). » Pourtant la seule leçon que tire le socialiste local c’est la percée du FN. « La poussée du FN, générale sur tout le canton, a été une surprise », souligne le maire, Gilles Battut (PS), conseiller général de Bourg-Lastic, qui dresse un constat : « La droite classique n'a pas fait le même nombre 1er_mai_06de voix que d'habitude ».

Même constat, quand bien même ne connaîtrait-on pas, là non plus, les lieux dont il est question, dans « L'Indépendant » analysant les résultats de l’Aude. Sous le titre « L'autre Front « populaire » », c’est le même écart avec le discours dominant sur l’hégémonie lepéniste.  « Même si le Front de Gauche et Mélenchon n'ont pas transformé l'espoir né de sondages flatteurs, du côté des militants communistes, peu habitués à pareille fête, on est ravi du score décroché dans le département 13,15% contre 11,10% au plan national ». « L'avancée est énorme depuis 2009. Grâce au Front de Gauche, la gauche tout entière représente 46% contre 42% en 2002 », commente Amandine Carrazoni-Omari du Parti ommuniste. Dans l'Aude, Mélenchon a visiblement bénéficié du gros travail militant de certaines composantes du Front, notamment dans la Haute-Vallée et dans les Corbières. Il réalise son meilleur score sur le canton de Lagrasse avec 20,23% devançant nettement Marine Le Pen (15,38 %). Il est ainsi premier dans les communes de Maironnes, Treiziers et Montirat. Tout comme sur les sommets de Bugarach où il partage la victoire avec Hollande (41 voix) devant Le Pen (23) et à Fontjoncouse, avec 20 voix contre 12 à Le Pen et 6 seulement à Hollande. Il fait jeu égal avec Marine Le Pen à Lagrasse même (55).Dans la Haute Vallée, on peut citer plusieurs communes où il devance le FN à Axat, Rennes-le-Château, Rennes-les-Bains, Roquetaillade, Montazels ou encore Alet-les-Bains. Dans le Carcassonnais, on notera aussi sa victoire à Lastours avec 33 voix devant Hollande 23. Amandine Carrazoni explique ces bons résultats ponctuels par « une bonne implantation de 20120501_0341certains militants du Parti de gauche très actifs. On a eu pas mal d'adhésions de jeunes. On fait des bons scores là où on a travaillé de façon unitaire. »

Ces exemples illustrent en l’étendant le sens du coup d’œil que nous avions jeté sur les quatorze grandes villes sur dix-sept de plus de 150 000 habitants où nous avons battu le Front National. Car non seulement nous l’avons battu mais il y a nettement reculé par rapport à son score de 2002. Les villes étant des avant-postes je considère ces résultats comme des indicateurs du futur en vue pour nous si nous ne lâchons rien. Tout ceci étant lu, goûtons à présent le sel de cet article du « Midi Libre » ! Sous le titre « Une vague bleue Marine » dans le Gard ? Non, sire, une vaguelette », Nathalie Balsan-Duverneuil signe une sorte de petit brûlot. « Halte au feu ! écrit-elle. En matière de politique et de résultats électoraux de l'extrême-droite, on a vite fait de s'enflammer. Mais il est toujours intéressant de comparer les chiffres exacts avec l'évolution des populations inscrites sur les listes. Et, en analysant les chiffres (1) avec plus de précision, le constat est considérablement plus nuancé qu'annoncé. En effet, en 2002 dans le Gard, Jean-Marie Le Pen (FN) et Bruno Mégret (MNR) recueillaient à eux deux 89 712 voix sur 445 562 inscrits. En 2012, Marine Le Pen (FN) obtient certes 106 646 voix (soit 16 934 voix de plus), mais pendant ce temps-là, le nombre d'inscrits sur les listes électorales a atteint le nombre de 513 138, soit 67 576 électeurs de plus. Le vote extrême-droite augmente de 0,5% des inscrits dans le Gard depuis 2002. Dans le Gard, en 2002, Jean-Marie Le Pen et Bruno Mégret récoltaient les suffrages de 20,2% des inscrits sur les listes électorales. Pour tomber à 13,1% des inscrits en 2007. Et la "vague" annoncée pour le premier tour du scrutin de dimanche amène Marine Le Pen à une augmentation de seulement… 0,5% des inscrits, à 20,7%. On est loin du tsunami. Et à regarder le scrutin à l'échelle nationale, on constate que l'augmentation du vote d'extrême-droite croît moins vite dans le Gard que dans l'ensemble du pays. Nous sommes en effet passés de 13,3% des inscrits pour l'extrême-droite en 2002, à 8,6% en 2007 pour terminer à 13,9% en 2012. Une augmentation de 0,6%. Dans le Gard, le vote pour la gauche radicale augmente pendant la même période de… 2,5 %. En précisant les choses, et en comparant l'évolution de l'extrême-droite et celle de la gauche radicale on observe un autre phénomène intéressant, pas, ou peu mis en évidence par les médias. En 2002, dans le Gard, Arlette Laguiller (LO), Olivier Besancenot (LCR), Daniel Gluckstein (PT) et Robert Hue (PCF) obtiennent à eux quatre 47 208 voix, soit 10,5% des inscrits du département. Contre 9,5% des inscrits du pays. Et en 2012, Nathalie Arthaud (LO), Philippe Poutou (NPA) et Jean-Luc Mélenchon (FdG) obtiennent à eux trois 61 892 voix, 20120501_0396soit 12% des inscrits du département. Contre 10% dans tout l'hexagone. (…) Malgré le "bruit" médiatique, les choses ne sont pas toujours ce qu'on croit. (1) : Sources : chiffres définitifs du Ministère de l'Intérieur »

Cette sorte de revue de presse qui fait justice des refrains mondains à propos du Front National ne serait pas complète si je n’y ajoutais ce point de vue paru dans « Le Figaro ». Je l’ai retenu car il nous rend justice à propos d’un argument mille fois rabâché sur le parallèle entre les électeurs du Front National et ceux du Front de Gauche. Je sais bien que je n’ai pas à convaincre sur ce sujet ceux qui me lisent. Mais je crois utile de citer une analyse qui peut ensuite servir d’argumentaire ici où là et qui ne vient pas de nos milieux. Sous le titre « Vote contestataire, les enjeux de la bataille », Jérôme Sainte-Marie, directeur du département opinion de l'institut de sondage CSA, « souligne les différences d'opinions et sociologiques entre les partis de Marine Le Pen et de Jean-Luc Mélenchon ». On va voir que si ce n’est pas tendre pour nous ce n’en est pas moins instructif. « La victoire sans appel de Marine Le Pen sur Jean-Luc Mélenchon dimanche dernier, à l'issue d'un duel qui a marqué toute la campagne, constitue une donnée essentielle pour le prochain quinquennat. À l'orée d'une période qui sera, quel que soit le vainqueur du second tour, celle de la contrainte budgétaire et de la mise sous tension du modèle social français, la maîtrise de l'hégémonie idéologique sur les représentations des catégories populaires est l'enjeu décisif pour les deux forces principales politiquement contestataires. Ceci est d'autant plus important pour l'avenir de la société française en général qu'il s'agit de deux courants politiques parfois stigmatisés ensemble sous le terme polémique de « populisme », mais dont l'analyse des opinions et même de la sociologie indique qu'ils sont irrémédiablement distincts dans leur origine comme dans leur orientation. L'approche dite du « fer à cheval » prétend faire du Front National et du Front de Gauche deux forces convergentes au-delà des faux-semblants. Comme toute pensée paradoxale, elle a l'apparence de l'intelligence, mais sa réalité est bien plus décevante. Tout d'abord, le sondage réalisé le jour du vote par l'institut CSA indique que seuls 12% des électeurs de Jean-Luc Mélenchon annoncent comme second choix possible, ou plutôt s'il avait été possible, un vote Marine Le Pen. De manière symétrique, seuls 15% de ceux ayant voté pour Marine Le Pen auraient sinon choisi Jean-Luc Mélenchon. Nous sommes bien en présence de deux groupes qui se vivent comme différents, et dont la zone d'intersection est électoralement marginale. » 

« Le contraste entre ces électorats est particulièrement net au regard de la motivation de leur vote. Le 22 avril, deux enjeux ont justifié leur choix pour les électeurs de Jean-Luc Mélenchon : le pouvoir d'achat, les inégalités sociales et l'emploi, seuls 3% d'entre eux citant l'immigration. Ce sujet est, à l'inverse, la raison avancée par 66% de ceux ayant voté pour Marine Le Pen, très loin devant tous les autres thèmes proposés. Ce n'est plus une différence, c'est une opposition absolue, en 20120501_0342parfaite résonance avec l'antagonisme du discours des deux candidats sur ce sujet. Pour autant, la structure des deux électorats présente quelques analogies.

Comme ceux de Marine Le Pen, les électeurs de Jean-Luc Mélenchon appartiennent le plus souvent aux catégories populaires. Il s'agit, dans un cas comme dans l'autre, pour les deux tiers d'entre eux de personnes en activité, alors que 47% des électeurs de François Hollande et 56% de ceux de Nicolas Sarkozy sont des inactifs, retraités, personnes au foyer ou étudiants. On trouve également parmi eux, même si cela est plus marqué parmi l'électorat frontiste que chez celui du Front de Gauche, une proportion relativement faible de personnes disposant de revenus supérieurs à 3 000 euros. Un tel constat peut paraître évident, il souligne cependant l'inanité de la représentation du vote mélenchoniste comme le produit d'une tocade de « bobos » – si tant est que ce terme renvoie à une quelconque réalité sociologique, hors une poignée de quartiers centraux. »

« Une autre dimension rapproche les deux électorats, c'est la part d'espoir investi dans le vote. Dans le contexte actuel de crise, elle est au global relativement faible, seuls 33 % des Français pensant le jour du vote que leur situation personnelle s'améliorera si leur candidat était élu, au lieu de 50 % qui le disaient le 22 avril 2007. Seuls deux groupes se distinguent par une réponse majoritairement positive, les électeurs de Jean-Luc Mélenchon et ceux de Marine Le Pen. On mesure là surtout l'intensité de l'investissement dans le vote, et la volonté de croire dans le pouvoir du politique, qui caractérise ces deux groupes 20120501_0416ayant déjà mêlé leurs suffrages lors du référendum de 2005 concernant le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, à l'issue d'une campagne contre la technostructure européenne. »

« Entre ces deux forces très motivées, plaçant à des degrés divers les deux candidats du second tour sous surveillance, et voyant dans le scrutin actuel un tour de chauffe pour d'autres combats, la partie n'est pas égale. Jean-Luc Mélenchon a plus que quintuplé le nombre de voix de Marie-George Buffet de 2007, mais c'est au prix de l'absorption de la plupart des voix recueillies par la gauche radicale, dont le total n'est que de 12,8 % des suffrages exprimés, soit plus qu'en 2007 (7,7%), mais moins qu'en 2002 (13,8%). À l'inverse, le score de Marine Le Pen est une indéniable réussite, bien au-delà du record précédent de 2002 en termes de nombre de voix. Son succès principal n'est pourtant pas là, mais d'avoir recueilli deux fois plus de suffrages parmi ceux qui estiment faire partie des classes populaires ou défavorisées. Cette domination frontiste chez ceux qui constituent, de façon subjective, la classe socialement dominée est une cruelle réalité pour le Front de Gauche. L'utilisation stratégique du thème de l'immigration par Marine Le Pen comme par Jean-Luc Mélenchon – la première pour diffuser une lecture nationaliste des phénomènes économiques et sociaux, le second pour unifier les revendications des catégories défavorisées – a produit des effets manifestement inégaux. La préparation d'un troisième tour social, pour paraphraser la gauche radicale, s'en trouve d'autant éloignée, mais le hiatus entre le discours des pouvoirs et la subjectivité populaire n'en est en rien réduit. Le succès de Marine Le Pen est d'avoir recueilli deux fois plus de suffrages parmi ceux qui estiment faire partie des classes populaires ou défavorisées. Cette domination frontiste est une cruelle réalité pour le Front de Gauche. » Sans vouloir faire une lecture de détail, je ne contesterai cependant pas que nous n’ayons pas atteint le but visé. Et c’est cruel en effet. Mais je n’oublie pas quelle difficulté ce serait de résoudre en une élection et trois ans d’existence ce que l’extrême-droite a construit depuis 1971. Elle court devant, c’est sûr. Mais nous courrons aussi. Mais nous courrons plus vite qu’elle ! Nous la rattraperons donc. Telle est la situation que montre la prolongation des tendances actuelles.  

Il y a des compliments pour lesquels on se ferait tuer. Tel celui mis en ligne le dimanche 29 avril dernier dans « Charlie Hebdo ». Signé Cavanna. Je ne dis pas que ce soit pur blanc-seing, loin de là. Mais quand même ! Lisez. « On a beau être revenu de tout. On a beau ne plus croire à rien. On a beau savoir que derrière tout ça il n’y a que baratin et jolis mouvements de menton, on a beau, on a beau, merci à l’artiste qui sut faire renaître pour nous, fût-ce l’espace d’un instant, les grands frémissements populaires, les forêts de poings fermés dressés parmi l’océan des drapeaux rouges, les « Internationale » qui ne se bêlaient pas comme des cantiques… Merci, camarade Mélenchon. Tu nous as fait rêver, c’est toujours ça de pris. « Romantisme révolutionnaire ». C’est ce qu’on te reproche. Et d’où voudrait-on qu’il vienne, le romantisme ? De la soumission résignée à l’état de fait ? Du soutien passionné à l’un des gestionnaires pépères qui étalent leurs tronches sans conviction au coin des rues ? Bien sûr, on n’y croit pas vraiment, on vibre, on s’entreregarde, on se marre, elle est bien bonne… La Révolution, rien que ça ! Avec la majuscule. La VIème République. Bien sûr, on votera utile, on garde les pieds sur terre. Ça n’empêche pas de se laisser fouetter le sang par ce dandy cravaté comme un Robespierre qui n’a pas la trouille, en pleine crise économique généralisée, d’appeler à foutre les patrons en l’air au nom d’un communisme ingénu fleurant le dix-neuvième siècle.

On se résignait à un Hollande-ou-Sarko sans surprise, à peine si l’on attendait de la petite Le Pen, successeur de son papa, qu’elle produise quelques intermèdes bruyants pour réveiller un peu ce combat de chiens fatigués autour d’un os aride. Tu nous as réveillés, camarade ! La bonne blague serait que tu sois élu au premier tour ! En tout cas, dès aujourd’hui tu existes, je me retiens d’y croire mais je ne peux empêcher cette jubilation rigolarde de m’illuminer l’intérieur. Éveille les jeunes, rajeunis les vieux, secoue-nous le cul, rue, piaffe et gueule. Si 20120501_0430ce n’est, comme l’insinuent ceux qui n’aiment pas cela, que l’image de toi que tu veux donner, vive l’image, elle me convient, elle vaut bien les mornes gueules des sauveurs diplômés de la patrie. »

Moins drôle, bien moins sympathique : voici une mise en garde. Comme vous le savez bien des socialistes peuvent être absolument déloyaux de toutes les façons possibles. Une nouvelle manœuvre de leur part a été inaugurée en Essonne. Elle consiste à utiliser ma prise de position à propos du deuxième tour de l’élection présidentielle pour faire croire qu’elle s’applique à leur candidat local à l’élection législative. On se pince, mais c’est possible. Cette filouterie, un candidat aux élections législatives pour le PS, Malek Boutih, vient de la commettre. Il reproduit sans me consulter et sans donc mon autorisation ma photo et mes propos dans son matériel de campagne pour l’élection législative dans laquelle il voudrait succéder à Julien Dray. Comme vous le devinez, il s’agit de créer de la confusion parmi les électeurs. Bien sûr, je ne soutiens d’aucune manière M. Boutih aux élections législatives. Je souhaite au contraire que les électeurs ne le choisissent pas. J’ai une bonne raison au moins, en plus de ce que ce genre de méthode laisse prévoir de son sens moral en politique. Cette raison c’est qu’il y a dans cette circonscription un candidat du Front de Gauche. Et pas n’importe lequel ! Notre candidat dans cette circonscription, c’est François Delapierre, qui a été le directeur de ma campagne présidentielle. Je vous met donc en garde. Soyez attentifs. L’utilisation de mon nom, de mes photos ou d’extraits de mes textes et déclarations doivent toujours être examinés dans le contexte. D’une façon générale ne croyez pas ce que disent les socialistes surtout s’ils sont candidats.

le 3 mai 2012

JEAN-LUC-MELENCHON.fr

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