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la Cagouille Enchaînée
7 septembre 2012

Jacques Guyon: "Je n'écrirai surtout pas mes mémoires"

L’éditorialiste et directeur de la rédaction de Charente Libre a signé son dernier papier samedi. Il répond à l’hommage rendu par de nombreux lecteurs.

Jacques Guyon tourne une page dans sa maison de Torsac. Photo CL

Une interview ? Tu me fais ch... J’ai déjà eu la chance de lire ma nécrologie samedi!» Jacques Guyon ne fait pas partie de ces journalistes qui se regardent le nombril. Mais comme il le dit lui-même, il ne peut rien refuser à Charente Libre et à ses lecteurs, nombreux à lui avoir témoigné leur attachement après l’annonce de son départ à la retraite samedi.

Ce Charentais pur malt était entré à CL comme stagiaire le 1er juillet 1972. Quarante ans et deux mois plus tard, à 64 ans, il s’en va avec l’aura de l’éditorialiste et du directeur de la rédaction. Jacques n’a pas seulement bousculé nos lecteurs et les idées reçues, il a aussi imprimé sa marque sur notre journal et biberonné plusieurs générations de journalistes en leur inoculant quelques valeurs: la liberté et le courage, la pertinence avec un brin de provoc.

N’est-ce pas frustrant de partir maintenant à la retraite? Il y a encore tellement de choses à décrypter sur la France, sur la société, sur le monde?

Jacques Guyon.
Si j’attendais qu’il ne se passe rien, je ne prendrais jamais ma retraite. Je ne voulais pas faire le match de trop. Ce métier, on ne peut pas le faire si on n’a plus l’envie.

De nombreux lecteurs vous ont rendu hommage. J’imagine que cela vous a touché.

Cela me fait plaisir. Régulièrement, j’étais interpellé par des lecteurs qui m’écrivaient, me téléphonaient. C’était sympa et souvent très argumenté. De temps en temps, j’ai eu des témoignages de sympathie de gens de droite dont je ne partageais pas le point de vue.

Certains vous jugeaient d’ailleurs trop marqué à gauche. Peut-on être neutre quand on est éditorialiste?


C’est vrai que Sarkozy m’agaçait. Mais très vite, Hollande m’a lui aussi donné l’occasion d’être agacé. Mais il n’y a pas que la politique française. Il y a aussi le monde qu’il faut essayer de comprendre. Un édito, cela peut-être plusieurs choses à la fois ou successivement. Du décryptage, de la prospective ou un coup de gueule. Oui il faut être engagé, dire ce que tu crois, ce qui te semble bien et intelligent. Tant pis si tu te trompes. De toute façon, les lecteurs te le disent.

Vous étiez souvent cité dans les revues de presse des radios. Vous avez payé?

Oui, très cher [rires]. C’est peut-être parce que j’essayais de sortir du ronron de la presse où les éditos sont souvent convenus. Malgré sa taille modeste, Charente Libre est un journal qui compte, parce que grâce à des gens comme Louis-Guy Gayan ou Max Dejour, on a été parmi les premiers à bousculer un certain nombre de choses.

N’est-ce pas un handicap de commenter l’actualité internationale depuis Angoulême?

Cela peut l’être. Mais cela évite aussi d’être tenu au politiquement correct, de se retrouver au milieu de gens qui pensent tous la même chose. Chez les journalistes, il y a un effet mouton de Panurge. Regardez les unes en ce moment sur Hollande.

Aviez-vous des réactions d’hommes politiques?

Cela m’est arrivé avec plusieurs ministres et Sarkozy lui-même. Il m’avait invité, soi-disant pour me tirer les oreilles. En fait, il m’avait surtout fait un grand numéro de séduction.

Vous avez aussi fait du terrain. Quels sont les reportages qui vous ont marqué?

L’enlèvement de Maury-Laribière, le patron des tuileries de Roumazières. On dormait devant son domicile. Et pas qu’une nuit! Il y avait un côté Rouletabille. Beyrouth aussi. Je n’avais jamais connu la guerre. Des roquettes tombaient partout autour de moi, ça faisait drôle. Il y a également eu l’attentat du 11 septembre au World Trade Center.

Quand j’en suis revenu, j’étais malade d’avoir vu ça, d’avoir respiré ces odeurs. Il y a aussi plein de rencontres. Avec des anonymes, comme ce papy plein de sagesse du côté d’Aigre. Et des gens célèbres. J’étais allé interviewer Gilbert Bécaud lors d’un spectacle à Bordeaux. On avait partagé le whisky dans sa loge en buvant dans le bouchon. Lors de son passage à Angoulême quelques jours plus tard, je lui avais amené une bouteille.

Vous écriviez sur les hommes politiques nationaux. Que pensez-vous des Charentais?


Je ne suis pas le plus critique. Il y a eu de grands personnages: Ravaillac, Gaillard, Mitterrand, Boucheron [rires].

Qu’allez-vous faire maintenant? Cultiver votre jardin?

Je n’ai pas encore choisi, mais il y a plein de choses qui m’attirent. Lire, voyager, faire des stages de cuisine, peut-être de la peinture ou de la sculpture. J’écrirai peut-être aussi des choses, mais surtout pas mes mémoires. 


7 Septembre 2012 | 11h07 - Mis à jour | 11h07 - Armel Le Ny

CHARENTELIBRE.fr

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