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la Cagouille Enchaînée
28 février 2011

DON DU SANG : UNE MANIF POUR NE RIEN GAGNER

Les donneurs de sang bénévoles ont manifesté samedi matin à Angoulême. Pour défendre le don gratuit, menacé de dérive marchande. Petit à petit, ils se font entendre.

Ils ont des tenues orange fluo, des casquettes, des banderoles, des pancartes et même des ballons «clap-clap» qui font des bruits de casseroles. Tout pour se faire remarquer. Sans doute des manifestants chevronnés qui maîtrisent l'art du défilé et ne ratent pas une occasion de descendre dans la rue... Erreur: «La dernière fois qu'on a manifesté, c'était en janvier 2010, en pleine BD, sous des flocons gros comme ça», rigole un participant. Ces drôles de pèlerins sont juste là pour défendre une valeur essentielle à leurs yeux: celle du don du sang, forcément gratuit.

Ils n'étaient qu'une cinquantaine, ce samedi matin à Angoulême, venus de tout le département, à défiler stoïquement sous la pluie fine et froide entre La Bussatte et la préfecture dans les rues désertes. «On a choisi cet itinéraire pour rencontrer un maximum de monde, se marre Jean-Pascal Willaumez, le président des donneurs de sang en Charente. Mais je crois que c'est raté!»

Ce qui les met vent debout, c'est un mot d'apparence anodine glissé dans un texte sur l'accès aux produits sanguins: pour être efficace, il devra passer par «une pluralité d'acteurs nationaux et étrangers recourant à différentes sources et modes de collectes, sang et plasma, en don bénévole ou indemnisé». Le gros mot, c'est «indemnisé». «On manifeste pour ne rien gagner!», résume Jean-Pascal Willaumez.

Le doigt dans la machine

Au départ du cortège, le député Jean-Claude Viollet est un ardent défenseur de leur cause. Il a même récemment posé une question à l'Assemblée nationale dans ce sens. Et la réponse ne l'a pas vraiment rassuré parce qu'elle institutionnalise la possibilité dérogatoire d'avoir recours à des produits payés. «C'est une question d'éthique. On est en train de riper sur des fondamentaux. Ce qui nous inquiète, c'est le passage à un système dans lequel le sang devient une marchandise. C'est contraire au code civil, au code de la santé.» «Aux droits de l'Homme et au droit européen, complète Jean-Pascal Willaumez. Tout produit issu du corps humain ne peut pas être une marchandise.»

Et pourtant, la France fait figure d'exception, aux côtés des pays du Benelux, pour la gratuité des dons. «On est dans une démarche de marchandisation programmée. Quand on met le doigt dans la machine, on s'y retrouve avec le corps tout entier», pointe le président des donneurs de sang.

Déjà, il y a vingt ans, le débat avait surgi une première fois: «On avait commencé à parler de rémunération, les labos voulaient monter des partenariats. On avait obtenu gain de cause», se souvient Jean-Pascal Willaumez. Et aujourd'hui, «nos craintes se confirment», insiste-t-il. «Le ministère de la Santé permet à une société française d'acquérir des établissements où on prélève du sang sur des vendeurs.»

Les manifestants, reçus à la préfecture, ont eu l'assurance que leur requête serait transmise au ministre de la Santé. Jean-Marie Judde, élu en charge de la solidarité au conseil général, les entendra prochainement. Jean-Pascal Willaumez compte bien obtenir l'adhésion des autres députés charentais. Pas de quoi faire l'ouverture des journaux nationaux. «Mais ne rien faire, c'est laisser faire. Petit à petit, la mayonnaise commence à prendre», constate le président des donneurs de sang. Prochaine étape le 14 juin avec la journée mondiale des donneurs de sang. «On s'installera sur la place des Halles à Angoulême. Nous serons visibles.»

 

 

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