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la Cagouille Enchaînée
28 février 2011

ALAIN JUPPÉ RENOUE AVEC DES AFFAIRES PAS SI ÉTRANGÈRES

L’ex-Premier ministre retrouve un poste où il s’est distingué de 1993 à 1995. 

C’était le 18 janvier à l’Assemblée. La veille avait eu lieu l’enterrement des deux jeunes Français tués après leur enlèvement au Niger. Yves Durand, député socialiste du Nord, pose au Premier ministre une question d’actualité. Alain Juppé se lève dans un hémicycle subitement silencieux et répond. Le ministre de la Défense commence par dire qu’il comprend «l’indignation des familles» et «la révolte de leurs amis qui [lui] ont demandé de démissionner». Puis il raconte les faits, l’état de l’enquête, revient sur le processus de décision qui a conduit dans la nuit du 7 au 8 janvier à lancer une opération militaire contre les ravisseurs. «Le président de la République a pris cette décision en accord avec le Premier ministre et avec moi-même. Nous avons, je crois, fait notre devoir», conclut-il. Les députés applaudissent, y compris sur les bancs socialistes. «C’est le seul à tenir un discours d’homme d’Etat», reconnaît, bluffé, un élu d’opposition à la sortie de l’Assemblée.

Vice-Premier ministre. En faisant hier appel à Juppé pour le ministère des Affaires étrangères, Nicolas Sarkozy conforte l’ancien chef du gouvernement dans ce rôle de vice-Premier ministre qui était déjà plus ou moins le sien depuis son retour au gouvernement, le 14 novembre. A 65 ans, celui dont Jacques Chirac a dit «il est le meilleur d’entre nous» retrouve un poste qu’il avait occupé de 1993 à 1995, avant d’être appelé à Matignon. Et où il a laissé de bons souvenirs.

Le premier passage de Juppé au Quai d’Orsay se situait en période de cohabitation. Après la débâcle électorale de la gauche aux législatives de 1993, François Mitterrand appelle au gouvernement Edouard Balladur. Le ministre des Affaires étrangères a alors deux patrons : le Premier ministre et le chef de l’Etat. Entre un Président malade, et un chef de gouvernement de plus en plus accaparé par la présidentielle de 1995, Juppé s’affirme comme le vrai chef du Quai d’Orsay. A son actif, la préparation des accords de Dayton de décembre 1995, qui mirent fin aux combats interethniques en Bosnie-Herzégovine. La diplomatie française y joua un rôle essentiel. Sérieuse ombre au tableau durant cette période : l’impuissance française à empêcher le génocide rwandais de 1994.

L’état de grâce qui suit sa nomination en mai 1995 comme Premier ministre par Jacques Chirac sera de courte durée. Les manifestations de décembre 1995 l’obligent à renoncer à réformer les retraites. Le chômage atteint un niveau record. Quand, en 1997, Chirac décide de dissoudre l’Assemblée, les législatives tournent à la débâcle, ouvrant une nouvelle cohabitation avec, cette fois, un président de droite et un chef de gouvernement de gauche.

En 1998, Juppé est rattrapé par les affaires de financement occulte du RPR, dont il fut secrétaire général, puis président, de 1988 à 1997. Les emplois fictifs de la mairie de Paris lui vaudront, en janvier 2004, d’être condamné à dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis et dix ans d’inéligibilité, peine ramenée en appel à un an d’inéligibilité en décembre 2004.

Désert. Contraint d’abandonner ses mandats, il part enseigner au Canada, à l’université de Montréal. Cette traversée du désert va durer près de deux ans. Il retrouve la mairie de Bordeaux en octobre 2006, à l’occasion d’une élection partielle remportée haut la main. Il publie un livre, France, mon pays : lettres d’un voyageur, où il se présente comme un homme assagi, toujours «droit dans ses bottes», mais «moins pressé». En 2007, il soutient loyalement, mais sans enthousiasme, Sarkozy, qui lui confie un grand ministère de l’Ecologie et du Développement durable. Mais, battu en juin aux législatives, Juppé retourne à la mairie de Bordeaux, où il est réélu en 2008.

Sur son blog (al1jup.com), qu’il a créé fin 2004, il distille commentaires et réflexions, toujours loyal mais n’hésitant pas à se montrer sévère avec certaines mesures comme la réforme territoriale et la taxe professionnelle. Raison de plus pour que Sarkozy lui demande à l’automne 2010 de revenir au gouvernement. C’est chose faite le 14 novembre, avec rang de numéro 2. Et maintenant de numéro 1 bis. 

   LIBERATION.fr  

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